Fabrication d’une draisienne en carbone pour le fiston

Salut, moi c’est Aurélien mais tout le monde m’appelle Stric.
Je suis monteur de roues de vélos à mon compte (Les roues de l’écureuil), j’ai le vélo dans le sang depuis que je suis gosse, et un gosse qui a un salaire ça donne un garage rempli de 12 vélos (cargo, route, piste, vtt, pumptrack, bmx, gravel, vélo bar, vélo déco, etc)

Etant plutôt pas trop manchot de mes 10 doigts je bricole un peu les vélos, que ce soit en soudure ou en composites. Et là ce qui nous intéresse c’est ma dernière réalisation en carbone.

Il y a quelques années, j’avais fait pour ma petite nièce une draisienne en carbone. A l’époque le résultat était déjà plus que pas mal, le but étant de récupérer la draisienne le jour où j’aurais à mon tour un enfant et que la nièce ne s’en servirait plus.

Mais numéro 2 a suivi, et la draisienne fut transmise alors même que mini moi pointait le bout de son nez.
Qu’à cela ne tienne, il allait falloir que je remette les mains dans la résine pour mon fils, hors de question de le voir faire ses débuts sur un vélo Décath, et encore moins sur un Specialized !

En repartant du premier modèle j’ai ressorti la planche à dessin pour améliorer le concept. Première erreur à corriger, la hauteur de selle. Sur la première j’avais fait une hauteur similaire à ce qu’on trouvait sur les draisiennes du marché, mais le vélo n’était pas vraiment utilisable avant environ les 2 ans des nièces. Je suis donc parti dans l’optique de faire quelque chose au ras du sol, avec une hauteur d’enjambement mini. Spoiler : la draisienne obtenue est utilisable dès que le gosse sait marcher, donc 12 mois environ.

Deuxième amélioration à apporter sur la structure interne : lors de la première réalisation l’âme de la bête était en acier afin de garantir une résistance à toute épreuve et d’assurer un peu mes arrières. Vu le retour d’expérience et la résistance constatée du carbone, ce coup ci on sera sur du 100% carbone.

Et quitte à faire de la fibre, autant y aller franchement : combo guidon potence, tige de selle, fourche, cadre, tout y passera ce coup ci !

Première étape, valider la géométrie à l’échelle 1:1

Deuxième étape : on taille le cadre dans de la mousse qui servira d’âme au projet (l’idée de faire un moule pour avoir de quoi en faire d’autres m’est sorti assez vite de l’esprit : j’aime les projets uniques, sinon j’aurais pris un vélo chez Décath).
J’ai un gabarit JIG qui me permet de bricoler tout un tas de vélos (on parlera de mon vélo de piste home made plus tard) et qui là encore m’a servi à « verrouiller » la géométrie, c’est mieux si on veut que le résultat final soit droit.

Vient ensuite le drapage du carbone, puis la mise sous vide et à l’étuve. A ce moment là on enferme un gros tas de m*rd* dans un sac, on branche une pompe d’aquarium et on prie pour avoir quelque chose de potable le lendemain…

Sorti du sac, le résultat était au delà des attentes, certes il allait falloir user un peu de mastic et d’huile de coude pour avoir une surface bien lisse, mais la résistance était déjà largement au niveau espéré.

Vient ensuite le moment de fabriquer la fourche. Là je suis parti d’une fourche route carbone que j’ai « juste » modifiée pour passer en 12”. Ah oui, c’est du pivot conique 😀

Puis les composants, notamment le combo cintre potence. Je suis parti d’une chinoiserie que j’ai raccourcie pour passer sur une potence de 35mm. Les 2 protubérances à l’avant de cette base AliExpress, clairement c’était moche. Qu’à cela ne tienne, on va boucher et en profiter pour intégrer un éclairage dans l’espace disponible !

Pour la tige de selle, j’ai chiné un truc light sur Trocvelo, et pour être en accord avec l’avant il à fallu que j’insère un système d’éclairage. Fun fact : la tige de selle descend tellement bas que l’éclairage ne sera pas visible avant que je ne puisse lui remonter la selle, d’ici quelques mois. Oui, j’aime faire des détails qui sont invisibles, comme on dit « ouais mais moi je sais que c’est là »:)

Vient ensuite la selle. Sur le papier c’était simple : une Froggy de chez Selle Royal. C’est une selle spéciale minus, qui est super courtes. Si on revient à la géométrie, cet élément était indispensable pour pouvoir baisser au max la selle sans toucher ni le cadre ni la roue arrière.
Problème : elle n’existe plus en version avec rails, seulement en version fixation directe sur tube de 22,2. Oui, mais moi j’ai déjà passé 10h à modifier la tige de selle…. Il va falloir opérer docteur ! Donc dépouillage de la selle version tube (on vire tout le plastoc dessous pour avoir une base lisse) et il a fallu trouver des rails… Quoi de plus logique que d’utiliser une donneuse avec rails carbone ! Et voici donc la seule Froggy rails carbone au monde

Restait juste les roues, et là normalement c’est mon domaine. L’écureuil a dans ses fournisseurs des gens un peu fous (comme nous) et on sort donc 2 jantes carbone en 12”, couplées à 2 moyeux Mack visserie titane, avec une petite gravure perso pendant qu’on y est… Un petit rayonnage coloré comme je les aime et hop.

Dernière étape : la peinture. Dommage de cacher ce carbone, je suis donc parti sur un bleu nacré et une partie carbone apparent, le tout souligné d’un gris nacré tirant un peu sur le bleu. La bête est née, elle pèse 2920g.

Alors j’entends déjà les rageux dire que ça ne sert à rien, que c’est des sous foutus en l’air. A ceux là je répondrai : oui, mais on s’en fout. Et vous seriez surpris du prix comparé à la draisienne carbone Spé…
Le but était de ME faire plaisir, certains roulent en S-works à 15k et se font quand même déposer par des vieux en Mercier, ben là c’est pareil. A une différence près : une draisienne aussi basse que la mienne ça n’existe pas sur le marché, et mon gamin en fait tous les weekend depuis ses 15 mois 😉

Une dernière chose : je n’en ferai pas d’autres, en tout cas pas pour quelqu’un d’autre que mon fils 😀

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