Mon dernier ride Our Mother The Mountain

J’ai passé les 10 dernières années de ma vie entre Seattle WA, Grenoble et Portland OR. Ce n’est que lors d’un retour furtif à Grenoble, que de fil en aiguille, je me suis mis à faire de plus en plus de vélos, et de (re)découvrir la joie enfantine de pédaler. 

Quand je suis arrivé à Portland, ville de l’État d’Oregon, la première chose que j’ai faite a été de m’acheter un vélo de course en attendant que mes vélos qui voyageaient par bateau arrivent de ce côté- ci de la planète. Moi qui était habitué à acheter de vieux vélos de course hauts de gamme pour une bouchée de pain sur le Boncoin, j’ai vite déchanté en voyant les prix des vélos d’occasion sur Craiglist, le bon coin nord américain. 

Je me suis quand même résolu à acheter un vélo de course Motobecane assez récent, car oui Motobecane a été racheté par une firme américaine, et ils font toujours des vélos. Quand je vois le patrimoine autour du cyclisme en France, et là où en est, je me désole qu’on n’ ai pas pu faire mieux sur du long terme… Bon je m’égare un peu et ceci n’est pas le sujet, revenons à nos bisons.

Donc après avoir acheté mon Motobec, je me suis dit que j’allais acheter l’accoutrement du parfait cycliste en Lycra avec les chaussures et tout et tout. Et me voilà parti à l’assaut de ma nouvelle ville et des endroits à explorer à bicyclette. Ce ne fut pas facile, les Etats-Unis ne sont pas vraiment adaptés pour les vélos, ils y travaillent, et c’est de mieux en mieux, mais quand tu veux sortir d’une ville que tu ne connais pas et qui est faite pour l’automobile, tu déchantes un peu. A force de persévérance, recherche sur internet, etc j’ai enfin trouvé des endroits plus adaptés pour le vélo, mais  plus je fouinais et grattais la surface pour trouver les bons rides, plus j’entendais le mot Gravel, et plus j’entendais ce mot, plus je voulais moi aussi en faire, du Gravel. Ne vous m’éprenez pas, j’aime rouler sur la route, mais la vision de rouler sur des routes non pavées, sans circulation, a réveillé en moi, le désir d’exploration et de fun que je pouvais avoir quand j’allais sur des chemins en foret avec mes VTT quand j’étais gamin, ou que je faisais le con en BMX dans les petits villages.

© photo Davy Berruyer

A force de chercher je suis tombé sur des videos You Tube de Dustin Klein. Dklein comme on l’appelle par là-bas, se met en scène sur son vélo de Gravel, dans des endroits autour de Portland. Les rides avaient l’air super, c’est comme si faire du vélo était un groupe de musique en tournée. C’est l’image qui m’a tout de suite frappé en regardant ces vidéos. J’ai découvert que DKlein roulait avec un groupe qui s’appelle OMTM, OMTM étant les initiales de l’album et d’une chanson de l’artiste  de Country/Folk américain Townes Van Zandt. Album qui s’appelle Our Mother The Mountain et qui est  sorti en 1969.  Je vous conseille vivement de découvrir cet artiste si vous ne le connaissez pas, il fait partie des grands de la musique Country/ Folk, et moi j’aime beaucoup.

En continuant de chercher et de me renseigner, j’ai découvert qu’OMTM organisait des rides pendant l’année, et que n’importe qui pouvait y participer. On trouvait des flyers, et tout s’organisait comme un concert de rock. Normal me direz vous, les deux têtes pensantes de ce groupe à pédales, sont tous deux musiciens. En effet Ron Lewis et Ryan Francesconi, sont deux talentueux musiciens qui pensent le vélo comme un groupe de musique. Étant musicien moi-même, j’ai été touché en plein cœur par l’association de mes deux passions. 

© photo Davy Berruyer

J’ai donc commencé à essayer de rouler avec ces personnes, et de rouler les rides qu’ils proposaient, car en effet, la singularité d’OMTM. c’est de mettre à disposition des rides testés et approuvés par eux-mêmes. Ce sont en majorité des rides entre 80 et 100 km qui se déroulent pour la plupart du temps hors des sentiers battus. Ryan et Ron passent leur temps à explorer et trouver des nouveaux chemins abandonnés, établir des connexions complètement improbables, pour offrir une expérience de ride unique. Et pour être unique les rides OMTM le sont. J’ai dû beaucoup rouler et m’entrainer pour être capable de les faire ces rides, car ils sont longs et éprouvants, pas tous certes, mais la plupart oui (merci coach !). Les OMTM et autres cyclistes qui les accompagnent ont un très bon niveau, et quand tu pars de zéro comme moi, l’ascension est longue pour pouvoir savourer. 

A force de miles avalés et de travail, j’ai  commencé à être bien juste avant que le covid frappe les Etats-Unis. J’avais commencé à me faire un petit réseau de connaissances pour ne pas rouler seul tout le temps. Puis le Covid a frappé et je me suis retrouvé tout seul…

Une fois les vaccins répandus, les gens ont commencé à rouler ensemble, et c’est à ce moment-là, quelque temps avant que je rentre pour la France définitivement, que j’ai fait mon dernier gros ride. OMTM avait décidé durant le Covid de créer Ride Of The Month. Tous les mois, ils proposaient  un ride avec différentes variations de longueur pour que tout le monde puisse rouler et en profiter mais sans qu’il y ait trop de personnes en même temps au départ.  Tu avais accès au ride et traces et tu pouvais programmer toi-même quand tu voulais rouler. C’est comme ça qu’un samedi matin  je me suis retrouvé dans la toute petite ville de Carson dans l’État de Washington pour retrouver un groupe qui devait rouler Falls Creek Hinterland.

© photo Davy Berruyer

Ce ride se passe pour la grosse partie dans les Gifford Pinchot National Forest, une des forêts emblématiques de l’État de Washington. tellement emblématique  qu’à Portland on dit que les meilleurs rides de L’Oregon se trouvent dans l’État de Washington.

Bref, ce matin-là sur le parking, nous nous sommes retrouvés à trois, la majorité du groupe ayant fait demi-tour sur l’autoroute quand des pluies diluviennes se sont abattues sur eux. J’ai eu le droit aux mêmes pluies, mais moi j’ai continué.

Sur le parking et au vu de la météo nous avons beaucoup discuté et hésité, j’ai dit à mes camarades de ride, Nathan Jensen et Chris Brannen, que si nous le faisions ensemble, j’étais partant. Les Gifford c’est grand, et tu as beau avoir le ride dans ton GPS, s’il t’arrive quelque chose et que tu n’as pas de Garmin InReach, tu risques d’avoir de gros soucis…

© photo Davy Berruyer

Nous voilà donc partis, en croisant les doigts pour que le temps ne vire pas à la catastrophe. 

Fun fact : nous avions tous les trois des vélos titane, des roues HiFi et les mêmes chaussures Shimano RC7

Chaque ride OMTM est unique, et celui-ci ne faisant pas exception, il se trouvait à mi parcours des caves issues de l’activité volcanique des environs que tu peux ‘’visiter’’.

Swiper pour voir la galerie – © photo Davy Berruyer

Ce ride a été  à la fois magnifique et difficile. Nous avons eu de la pluie plusieurs fois, et de la pluie bien froide, surtout tout en haut. L’hiver au mois de juin est une réalité là- bas. Un ours noir a fait la course avec moi mais je ne l’ai pas vu, on a failli perdre Nathan lors de la descente de Falls Creek Trail, j’ai perdu la housse de mon appareil photo avec une batterie de rechange, qui a été retrouvée par un autre rider qui était parti après nous. Nous avons porté nos vélos pour traverser des ruisseaux, on s’est laissé aller à fond dans des descentes de Gravel interminable, on a misérablement mangé nos snacks sous la pluie et dans le froid, on a pris des photos, on s’est raconté des choses, on en a tous secrètement bavé à un moment ou un autre, mais nous l’avons gardé pour nous, on s’est attendu et on a roulé ensemble, et que c’était bon après ces mois de solitude ! On en a pris plein les yeux, du vert à perte de vue, la visite des caves était fun, mon premier test ride avec Beaux a été une réussite. les gros pneus ça passe partout et ça fatigue moins. On a aussi fait attention de ne pas croiser de cougar, on a croisé des pickups garés dans des endroits improbables, on est passé à côté du Pacific Crest Trail

Et pour conclure, je citerai D Klein avec son fameux And The Ride By The Numbers :

71.72 mi (115 km)

7267 feet of elevations (2215 m)

7h9m riding time

Récit écrit et roulé par Davy Berruyer

Éditeur et fondateur de Veloculte

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